Le parcours de Cyril Bouvet, passionné de nature, l’a mené de l’éducation à l’environnement à l’herboristerie, en passant par l’agroécologie.
Formé comme éco-interprète,  puis à l’ARH-IFH, il s’est installé dans les Bauges où il a créé le Jardin ethnobotanique du Semnoz, consacré à la transmission autour des plantes.
Co-auteur d’un guide sur les plantes sauvages de montagne, il propose aujourd’hui des stages et des sorties botaniques au sein de sa structure Naturalp. Son fil conducteur : aider chacun à renouer avec les plantes, se relier à son territoire et tisser une relation plus autonome avec la nature.
Cueillette d'épilobes

Bonjour Cyril Bouvet, avant de rejoindre la formation ARH-IFH, quel était votre parcours, et comment vous êtes-vous intéressé aux plantes ?

Concernant mon parcours, je peux remonter assez loin. Après un bac technologique, je ne m’y retrouvais pas du tout dans les études. J’étais davantage tourné vers le sport, alors j’ai commencé un diplôme d’éducateur sportif. Je n’avais pas vraiment de spécialité, mais je savais que je voulais bouger et être dehors : je faisais un peu de rando, j’aimais vraiment passer du temps en pleine nature, surtout en montagne.

C’est comme ça que j’ai entamé une formation d’accompagnateur en montagne. Mais je n’avais pas encore le niveau. Du coup, je suis parti un an voyager en Amérique du Nord et en Amérique centrale, avec cette envie de découvrir le monde, d’autres cultures, d’autres langues, en recherche existentielle et spirituelle, et de me perfectionner dans la connaissance et la pratique de la montagne.

J’ai beaucoup baroudé dans les Rocheuses, au Canada puis dans les Rocheuses américaines. Là-bas, j’ai fait énormément de randonnées, souvent en solitaire, sac au dos, sur plusieurs jours, parfois une semaine ou deux. Ces moments-là m’ont beaucoup fait réfléchir. Il y avait de longues heures de marche, de silence, de méditation : face à moi-même, à la vie, à la montagne, au sauvage, en immersion dans ces grands espaces naturels, ce périple m’a beaucoup enrichi.

À l’époque, on ne parlait presque pas de psychologie environnementale, ou d’écopsychologie alors qu’aujourd’hui, vingt ans plus tard, ça commence à se développer.

Quand je suis rentré en France, un an plus tard, je me suis retrouvé avec pas mal de questions sur l’humain, sur ce que nous sommes, sur ce qui nous pousse. Et c’est là que je me suis tourné vers des études de psychologie.

Même si j’avais toujours ce lien à la nature, qui commençait vraiment à prendre de la place, et ce plaisir de découvrir les grands espaces naturels… finalement, j’ai plutôt fait des études de psychologie, que de biologie, avec l’idée, d’aller vers l’éthologie, l’étude du comportement animal, mais aussi, l’envie de relier psychologie et nature… mais au bout de trois ans, j’ai arrêté, parce que je voyais bien que le cursus universitaire ne me convenait pas du tout. J’en ai quand même profité pour faire un DU dans l’étude du patrimoine (géographie, écologie, gestion et protection de la nature, histoire, ethnologie…).

Ça a quand même été intéressant, parce que je me suis rendu compte que ce qui me passionnait vraiment, c’était le lien entre l’humain et la nature. À l’époque, on ne parlait presque pas de psychologie environnementale, ou d’écopsychologie alors qu’aujourd’hui, vingt ans plus tard, ça commence à se développer. À ce moment-là, c’était encore à ses débuts.

Balade-découverte de plantes comestibles et médicinales

Finalement, je me suis investi dans une ferme éducative pour des jeunes en difficulté. Un collègue faisait déjà ça, et je l’ai rejoint. Là, on était dans du concret : un travail éducatif auprès de jeunes complètement déstructurés, avec aussi une dimension agricole, un travail de la terre avec eux et au contact de la nature. J’ai commencé à voir que ça me plaisait vraiment, ce lien homme-nature, et la manière dont la nature peut contribuer à notre bien-être, à nous aider à nous (re)construire.

Je me suis d’ailleurs rendu compte que, pour moi, ça avait été essentiel : comment la nature et la montagne avaient joué un rôle… presque de relais, ou plutôt de résilience, quelque chose qui m’avait permis de me retrouver, me relier…Et puis, travailler avec ces jeunes, c’était trop dur. Je n’avais pas les bons outils, donc je ne suis resté qu’un an.

À ce moment-là, je me suis posé et je me suis dit : Bon, est-ce qu’il y a vraiment quelque chose que tu as envie de faire ?

C’est là que j’ai eu envie de me former à ce qu’on appelle l’éducation à l’environnement, ou l’éducation à la nature. J’ai donc fait une formation d’éco-interprète, qui est un chargé de projet en éducation à l’environnement, avec l’URCPIE de Franche-Comté, les Centres Permanents d’Initiatives pour l’Environnement. Et là, j’ai découvert tout un monde vraiment passionnant : la pédagogie active, l’interprétation du patrimoine, les jardins pédagogiques, l’animation nature… Tout ça m’a énormément plu.

Narcisse des poètes, lys martagon et arnica montana

Mais j’avais des lacunes en sciences naturelles… J’ai travaillé dans le milieu associatif pendant plusieurs années : centres de vacances, associations, structures d’éducation à l’environnement, collectivités… Mais comme j’avais ces lacunes, c’était souvent compliqué de trouver du boulot, je faisais surtout des CDD. J’ai travaillé dans un jardin à papillons et une ONG de conservation de la nature, ce genre de choses… mais ce n’étaient que des petits contrats.

Alors je me suis dit : Bon, eh bien, puisque je n’arrive pas à avancer par ce biais-là, je vais monter ma propre activité. J’avais un projet de ferme pédagogique en tête depuis un moment, mais je n’avais ni les connaissances ni les outils pour le concrétiser.

Du coup, j’ai suivi une formation agricole, avec une spécialité en élevage caprin et surtout en plantes aromatiques et médicinales. J’ai fini ce BPREA en agriculture à Nyons, en orientation bio, bien sûr.

Le problème, c’est que je n’avais pas de fonds et je ne trouvais pas de terrain pour lancer mon projet. Je voulais faire une microferme, et ça ne fonctionnait pas.

Entre temps, j’étais passé faire plusieurs stages en agroécologie à Terre et Humanisme, l’association de Pierre Rabhi en Ardèche, qui m’a beaucoup enthousiasmé et marqué.

Et quand j’ai regardé les différentes écoles, l’ARH m’a plu pour son côté simple, scientifique, abordable financièrement, militante et puis le fait que ce soit à distance sur deux ans, ça m’allait très bien.

 La petite famille commençait à arriver, avec ses besoins… Alors, j’ai trouvé un boulot en Auvergne. J’ai déménagé et j’ai travaillé deux ans dans une distillerie d’huiles essentielles, comme responsable agricole et pédagogique. Je passais pas mal de temps dans la boutique de la distillerie : je faisais des visites guidées du lieu, du conseil en gemmothérapie, en aromathérapie et en herboristerie. Ils vendaient leurs propres produits, et c’est là que j’ai découvert la gemmothérapie, que je ne connaissais pas du tout avant. J’y développais aussi un jardin pédagogique pour les visiteurs et la mise en culture de plantes aromatiques.

En travaillant dans cette entreprise, je me suis rendu compte que l’herboristerie me parlait énormément, et que j’avais envie d’approfondir mon lien aux plantes et leur connaissance. J’avais déjà fait quelques stages d’aromathérapie, des stages de formations par-ci par-là, mais je voulais vraiment me professionnaliser.

À l’époque, j’avais un peu mis de côté tout ce qui était éducation à l’environnement, même si cette fibre éducative et pédagogique était toujours là, bien présente. Donc j’ai quitté mon travail dans cette entreprise pour approfondir mes connaissances… et c’est là que je me suis inscrit à la formation d’herboristerie à l’ARH-IFH.

Je cherchais à compléter mon parcours. Je voulais une école d’herboristerie qui m’apporte aussi beaucoup d’éléments scientifiques : en botanique, en chimie, en phyto…. Et quand j’ai regardé les différentes écoles, l’ARH-IFH m’a plu pour son côté simple, scientifique, abordable financièrement, militante et puis le fait que ce soit à distance sur deux ans, ça m’allait très bien.

Au début, j’étais parti pour faire l’École lyonnaise des plantes médicinales, qui m’intéressait aussi, mais finalement l’ARH-IFH m’a vraiment convenu.

Donc en 2015, je me suis inscrit dans le cursus, avec cette idée de travailler dans le monde des plantes, en faisant le lien avec mon travail d’accompagnateur en montagne que je voulais retrouver : éducation, transmission, un peu de production aussi… Mon projet n’était pas totalement ficelé, mais c’était clair que je voulais travailler avec les plantes et dehors.

Cycle "Plantes de l'autonomie", "Dessiner une plante"
Cueillette d’origan, swertie vivace et dryades à huit pétales

Que vous a apporté concrètement cette formation dans votre pratique professionnelle aujourdhui ?

Alors déjà, ça m’a permis de mieux comprendre une filière, parce que le monde de l’herboristerie, je l’avais un peu touché du doigt pendant ma formation à Nyons, mais pas énormément. Donc, mieux comprendre la filière, et aussi pourquoi l’herboristerie est un peu mise de côté en France.

Mais surtout, ce que ça m’a apporté, c’est le plaisir d’approfondir ma connaissance des plantes dans leur fonctionnement. Ce que j’ai aimé, c’est que la première année à l’ARH était centrée sur la plante elle-même : botanique, physiologie végétale et humaine, chimie etc. C’était exactement ce dont j’avais besoin. Un apport de connaissances scientifiques.

La deuxième année, plus centrée sur l’usage des plantes, les stages de terrain, les visites, la cueillette, l’herboristerie pratique, la pharmacognosie…

J’ai vraiment pris beaucoup de plaisir à approfondir tout ça, même si j’avais l’impression d’être un peu submergé par la quantité d’informations. À la fin, je me suis senti un peu déçu, dans le sens où j’avais l’impression de ne pas avoir acquis toutes les compétences du métier. On m’a rassuré : « T’inquiète, c’est normal. Il y a énormément d’infos, mais ensuite il faut pratiquer, continuer à t’investir. »

Finalement, ça m’a apporté des éléments techniques, un vrai savoir, et ça a vraiment affiné ma connaissance des plantes et de leurs usages, surtout médicinaux. Et ça m’a donné envie de continuer et de relier ça à tout ce que j’avais fait avant.

Cette formation a été un vrai moteur pour me dire : « Oui, c’est vraiment ça que j’ai envie de faire. »

Après, est-ce que j’allais réussir ? C’était une vraie question, parce que c’est une voie alternative.

Et puis j’ai eu une petite déception : il manquait selon moi des outils pour faire du conseil et de l’accompagnement individuel, un peu comme un naturopathe mais avec l’herboristerie.

C’est pour ça que plus tard, en 2024, je me suis inscrit à une formation de praticien : je sentais bien que je n’avais pas les outils nécessaires pour cet aspect-là.

C’est un jardin pédagogique, un jardin de conservation, et un lieu de production à venir : alcoolatures, macérats de bourgeons, tisanes, sirops, baumes. Dès que j’aurai l’atelier de transformation, j’aimerais vendre en circuit court…

Et après la formation, est-ce que les choses étaient plus précises pour vous ? Aviez-vous une vision plus claire sur l’articulation de votre vie professionnelle avec des ateliers, des animations ?

Non, non, pas vraiment. Parce que finalement, juste après la formation, en 2017, j’ai déménagé d’Auvergne avec ma famille. On est arrivés dans le Massif des Bauges, un magnifique massif de moyenne montagne, en Savoie.  Je voulais retrouver les Alpes, une ambiance qui nous plaisait, plus stimulante, plus montagnarde.

Je suis un peu revenu vers mes racines jurassiennes et alpines.

Il y avait pas mal de producteurs de plantes, une belle dynamique, un très beau milieu naturel, et aussi un potentiel de commercialisation intéressant grâce aux villes proches : Albertville, Annecy, Chambéry.

Un joli coin, pas perdu, pas isolé.

Et là, il fallait bosser : j’ai trouvé un travail chez un paysan-herboriste qui faisait de la production en bio, des transformations, sirops, tisanes, liqueurs, aromates. Donc j’ai un peu approfondi le travail de terrain : cueillette, production, séchoir… ça me plaisait beaucoup.

Mais c’était juste un boulot saisonnier, et donc à-côté, j’ai trouvé un emploi dans une association d’éducation à l’environnement qui gérait un écomusée consacré à la biodiversité savoyarde.

J’y étais responsable pédagogique pendant trois ans, avec beaucoup de liberté d’initiative. J’ai proposé deux choses nouvelles : des sorties de découverte des plantes et de leurs usages, parce que la demande était là et que ça me plaisait de le faire, et la création d’un petit jardin pédagogique de simples, dans la cour du musée. C’était un des axes de la muséographie et un bon moyen de faire un lien réél avec mes études à l’ARH-IFH.

Et puis, avec le Covid, l’association a arrêté de prendre un employé.

En 2021, je me suis dit :  » C’est le moment de me lancer dans mon activité, de devenir indépendant. « 

Donc je me suis mis en micro-entreprise, et j’ai commençais à avoir quelques contacts.

Pendant ce temps-là, je cherchais un terrain en montagne pour produire des plantes médicinales et en faire un jardin pédagogique. J’ai trouvé une parcelle en 2018 : 3000 m², avec une partie forestière et une grande partie ouverte.

Elle appartient à un pionnier de l’herboristerie dans les Bauges, qui avait commencé dans les années 2000 et qui avait arrêté en 2013 et il cherchait quelqu’un pour reprendre une activité d’herboristerie. On s’est bien entendu et j’ai obtenu un bail agricole de neuf ans sur son terrain, renouvelable.

Le lieu m’a plu tout de suite : à 1000 mètres d’altitude, face aux montagnes, entouré de forêt, avec une belle richesse d’insectes et de plantes, d’anciennes cultures.

Je n’ai pas voulu chambouler l’endroit : la première année, j’ai surtout observé. J’ai refait la clôture, fait un peu de bûcheronnage, pas mal d’observation…Puis en 2020, j’ai commencé un vrai plan, un design, la recherche de fonds…

J’ai monté une campagne de financement participatif qui m’a permis de remettre le lieu en état et commencer les premiers travaux. J’ai donné un nom au lieu : « Le Jardin ethnobotanique du Semnoz. »

 » Ethnobotanique  » parce que c’est un espace qui relie l’humain à la nature et aux végétaux : un lieu de pratique agroécologique et permacole, un lieu de formation à l’herboristerie, un lieu de conservation de la nature, un lieu qui montre comment accueillir la biodiversité tout en produisant.

C’est un jardin pédagogique, un jardin de conservation, et un lieu de production à venir : alcoolatures, macérats de bourgeons, tisanes, sirops, baumes. Dès que j’aurai l’atelier de transformation, j’aimerais vendre en circuit court, par exemple au marché bio d’Annecy.

Bain de forêt

Avez-vous commencé à produire sur cette parcelle ?

Pas encore : j’ai planté une haie champêtre, amélioré la mare, planté pas mal de choses. J’ai développé le jardin médicinal, c’est ce qui me parlait le plus. Puis, j’ai commencé à y mener des stages et des ateliers.

Bien sûr, j’ai fait un inventaire botanique (non exhaustif), pour valoriser les plantes sauvages et mieux comprendre la nature de mon sol avec les plantes bio-indicatrices. Il y a eu un gros travail agricole pour rendre les terres à nouveau cultivables. J’ai créé des buttes… avec peu d’outils et peu d’aide, mise à part la famille ou des amis.

Ce que j’ai vraiment développé au niveau de mon activité professionnelle, c’est toute la partie découvertes et formations en herboristerie et plantes sauvages, grâce aux bouquins notamment.

Pendant un an, j’étais au chômage, et un collègue, qui avait fait l’école de François Couplan, est venu me voir.

Il m’a dit : « J’aimerais écrire un bouquin mais pas tout seul. On est complémentaires, ça te dirait ? » On s’est lancés dans l’aventure, et ça m’a énormément fait progresser : les fiches plantes, les usages, les photos, la recherche documentaire…

On est partis sur un guide de terrain, mais qui peut aussi être un livre d’intérieur : « Le guide des plantes sauvages en montagne : découvertes, identifications, cueillettes et usages « . Il y a 70 plantes, 70 fiches, de l’étage collinéen à l’étage alpin.

On voulait réunir dans un seul livre ce qu’on cherche d’habitude dans trois ou quatre ouvrages différents : botanique, usages, cueillette, écologie, anecdotes, pédagogie, ethnobotanique… Habituellement, chaque spécialité fait l’objet d’un livre séparé, ce qui n’est pas pratique : nous avons, au contraire, essayé de réunir en un seul bouquin plein d’infos, pour inviter les gens à sortir, à découvrir les plantes, les utiliser, se relier au végétal.

Donc c’était un an de travail ?

Un an et demi, mais avec six mois très intensifs. Faire les photos m’a beaucoup plu : suivre les saisons, aller chercher ce dont j’avais besoin…
C’était une belle aventure, publiée chez Terre Vivante.

Après la parution du livre, avec mon collègue, on s’est dit qu’on allait créer des stages : de 1 jour à 3 jours, à la rencontre des plantes sauvages en montagne. Je fais des stages avec lui, et j’en fais aussi en solo, sous ma structure Naturalp.

Je propose des stages d’une journée :  » Initiation à l’herboristerie  » ou  » Créer son jardin médicinal « , au Jardin ethnobotanique du Semnoz, un stage d’initiation à la gemmothérapie, un autre sur les arbres, ou encore des stages « Plantes sauvages, » avec rando,  ateliers de terrain, cueillette sauvage, fabrication d’un apéro nature, d’un remède naturel. J’anime aussi des balades découvertes ou des ateliers sur les plantes comestibles et médicinales.

Randonnée "Plantes de montagne"
« Atelier du végétal » : apéro Nature,  stage « Gemmothérapie », stage « Créer son jardin médicinal »

 À quel public vous adressez-vous ?

Mon public principal, ce sont les individuels, je fais aussi un peu de scolaires, un peu de comités d’entreprise, des clubs de rando, des groupes constitués, parfois des familles.

Et puis je commence à intervenir pour des professionnels comme l’ONF ou des collectivités, lors d’événements ou de festivals. Je propose aussi des balades ou des randonnées  » Découverte des plantes de montagne  » dans le massif des Bauges. J’ai mis en place deux cycles :  » Se soigner avec les plantes « , 4 journées du printemps à l’été. Et  » Les plantes de l’autonomie  » : 3 journées, du printemps à l’automne, sur les plantes sauvages multi-usages. J’ai lancé ça l’an dernier, et pour une première année, c’était plutôt bien.

Je suis également formateur au Centre de Formation des Accompagnateurs en Montagne depuis 2025 où j’interviens sur le module « Plantes médicinales de montagne ».

Mais pour l’instant, je n’arrive pas à vivre entièrement de mon activité.

Donc je travaille à mi-temps, au collège des Bauges, comme accompagnant d’élèves en situation de handicap, en attendant de pouvoir vivre uniquement de mon activité dans les prochaines années.

Je suis en micro-entreprise depuis 2021, avec deux thèmes, l’herboristerie et les plantes sauvages où je veux développer la pédagogie, la production et l’accompagnement-conseil : ce sont finalement les trois axes qu’on retrouve souvent en herboristerie.

Je garde aussi un pied dans l’éducation à la nature : animations nature, bains de forêt, avec un lien entre plantes, arbres, bien-être. C’est très complémentaire : immersion sensorielle, activités sensibles ou ludiques en forêt, sur une demi-journée ou une journée.

Je suis aussi facilitateur de  » cours du vivant  » : un projet européen avec le Parc des Bauges, qui vise à transformer les cours d’école du Parc naturel régional pour reconnecter les élèves à la nature et crer des lieux plus écologiques. Cette démarche s’inspire des concepts de la permaculture et se fait dans la concertation. Je facilite, je conseille, j’accompagne, je réalise le design, je coordonne les chantiers participatifs, j’anime les réunions…

J’ai une grande diversité de prestations, en lien avec mon parcours, mais aussi parce que pour vivre de mon activité, je ne peux pas compter que sur l’herboristerie, même si c’est mon cœur de métier.

Stage "Plantes sauvages", avec cueillette et ateliers pratiques
Jardin de biodiversité, gentiane jaune

Et comment gérez-vous votre communication ? Avec les réseaux sociaux ?

Non, pas du tout. Je n’aime pas ça ! Je sais que je perds du public, mais je n’ai pas envie de participer à cette surutilisation du téléphone. Donc je n’utilise pas ce canal, même si je sais qu’il peut être intéressant.

Ma communication, c’est le bouche-à-oreille, une newsletter, une mailing list d’environ 200 contacts, quelques affiches, les offices de tourisme…
Je fonctionne un peu à l’ancienne.

Le site internet m’amène pas mal de monde, et j’aimerais mettre en place le paiement en ligne.

J’ai aussi fait des chroniques radio de 15 minutes (secrets de plantes) avec mon collègue co-auteur du livre : 52 chroniques, une plante par semaine, diffusées en 2023-2024, basées sur notre livre. Elles ont été diffusées dans plusieurs radios.

On peut encore les écouter sur Radio Alto.

Vous vous définissez comme éco-interprète.

En fait, j’utilise ce terme parce que c’était celui de la formation, mais ça ne parle pas trop aux gens, je parle plutôt « d’éducateur nature » ou « de responsable pédagogique en éducation à l’environnement ».

Le terme éco-interprète ne s’est jamais vraiment diffusé. La formation forme une trentaine de personnes par an, dans l’ingénierie en pédagogie de l’environnement.

Concrètement, un éco-interprète met en place des projets comme médiateur et pédagogue autour des problématiques environnementales et de nature.

C’était une formation très pertinente, mais qui ne m’a pas ouvert énormément de débouchés par la suite. Et une partie du cursus, les plans d’interprétation d’un territoire et la conception de panneaux d’interprétation, ne m’a pas trop parlé….

Par contre, ce que j’utilise beaucoup, c’est le bagage pédagogique : comment transmettre, comment créer des outils, comment accompagner l’apprentissage, comment animer une séquence pédagogique…

Et surtout, c’était une formation très concrète : ils nous ont fait vivre ce qu’on devait ensuite faire vivre aux autres. C’était vraiment immersif, et ça m’a beaucoup marqué. J’essaie de relier ça aujourd’hui avec les plantes et l’herboristerie.

Prairie fleurie au Jardin ethnobotanique du Semnoz

À plus long terme, vous souhaitez faire du conseil individuel. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Je me forme avec Christophe Bernard (AltheaProvence), partenaire de l’École Lyonnaise des Plantes Médicinales, sur sa formation en ligne : praticien en herboristerie. Je ressentais le besoin d’acquérir plus de connaissances : interactions médicamenteuses, les précautions d’emploi, savoir faire un bilan de santé, comment accompagner quelqu’un avec ses problématiques…

La formation donne aussi des outils sur l’hygiène de vie, les piliers du bien-être, un peu comme en naturopathie mais avec une spécialisation herboristerie, centré sur le vivant et la plante… On travaille aussi les posologies, les formes galéniques adaptées…

Bref, ça fait un vrai zoom sur l’accompagnement au mieux-être, en complémentarité avec les professionnels de santé. Je manquais d’outils pour me sentir à l’aise face à des demandes précises, donc cette formation vient compléter tout mon parcours. Je me suis inscrit il y a un an et demi, mais j’ai manqué de temps, donc je n’ai pas pu suivre correctement le cursus.

Je me suis fixé comme objectif de m’y remettre cet hiver, pour la finaliser l’année prochaine et pouvoir proposer mes services en 2026. C’est une formation à distance, avec beaucoup de contenu, et très complémentaire de tout ce que j’ai fait jusque-là.

Quel avenir pour les métiers en lien avec les plantes, selon vous ?

Votre question me fait penser à un événement qui a eu lieu à Nyons du 30 octobre au 1er novembre 2025 : « Imaginons ensemble l’herboristerie de demain. »

Je pense qu’il y a énormément de personnes qui s’y intéressent, qui cherchent plus d’autonomie, à retrouver un savoir ancestral, à se reconnecter à la nature.

Mais beaucoup vont chercher des infos sur Internet, ou ne savent pas à qui s’adresser. Elles ne sont pas forcément satisfaites de leur pharmacien ou de leur médecin.

Donc je comprends bien le mouvement militant pour réhabiliter le métier d’herboriste : il y a un vrai manque, un vide. Je sens une progression, mais encore minime. Pour moi, l’avenir est plutôt positif, mais dépendra de l’évolution réglementaire et législative.

Mon activité autour des plantes sauvages et de l’herboristerie est peut-être la plus facile à s’approprier pour les gens, parce qu’elle touche à leur territoire : comment se relier à son lieu de vie, comment cueillir local, comment comprendre et protéger les ressources, tout en sachant les utiliser…

Il y a évidemment la question de l’impact sur les milieux naturels, mais globalement, je vois plutôt un avenir encourageant, même s’il reste beaucoup de freins.

Est-ce qu’on aura un statut officiel d’herboriste ? Je ne sais pas.

Mais il y a de l’intérêt, un vrai mouvement, et dans un contexte qui pourrait devenir de plus en plus difficile, quelqu’un qui connaît les plantes localement, qui sait comment les utiliser, aura une place essentielle.

Je suis attaché à l’idée que les gens se réapproprient la connaissance des plantes de leur territoire, avec un besoin d’éducation à la santé naturelle. Il faut relier écologie et santé.

Auriez-vous quelque chose à ajouter ?

Oui, peut-être le mot de la fin, une phrase de Pierre Rabhi que j’aime beaucoup : « Il nous faudra répondre à notre vocation, qui n’est pas de produire et de consommer jusqu’à la fin de nos vies, mais d’aimer, d’admirer et de prendre soin de la vie sous toutes ses formes ».

Merci Cyril.

Compagnon indispensable pour reconnaître, comprendre et utiliser les plantes sauvages de montagne, le guide de Cyril Bouvet et Lionel Scaturro relie savoir botanique, identification sur le terrain et usages traditionnels.

Un livre à emporter dans le sac… et à garder longtemps dans sa bibliothèque.

Cyril Bouvet

Herboriste/accompagnateur en montagne
Eco-interprète/agroécologiste

Tél : 06 70 44 05 21

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